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jeudi 1 septembre 2011

Galveston


Galveston
de Nic Pizzolatto
Belfond 2011 / 19 €- 124.45 ffr. / 322 pages
ISBN : 978-2-7144-4700-5
FORMAT : 13,8cm x 22,2cm

Pierre Furlan (Traduction)


On the rocks

«Un médecin a pris une photo de mes poumons. Ils étaient pleins de rafales de neige. Quand je suis sorti du cabinet, les gens dans la salle d'attente ont tous paru soulagés de ne pas être à ma place. Il y a des trucs qu'on peut lire sur les visages». L'uppercut fait vaciller Roy Cady, le narrateur de Galveston, qui pourtant ne se laisse pas abattre : «on ne cesse pas d'être qui on est simplement parce qu'on a dans la poitrine un blizzard qui ressemble à des paillettes de savon».

Quelques heures plus tard, Roy, truand à la petite semaine et tueur à l'occasion, se rend donc chez Stan Ptitko, un mafieux patibulaire et caractériel. Leurs méfiance et antipathie mutuelles ont décuplé depuis que Stan sort avec Carmen, l'ex de Roy. La nouvelle mission que Stan confie à Roy sent d'ailleurs le traquenard vicieux. Premier épisode sanglant et ultra-violent de ce troublant roman noir.

Sorti vivant du piège, Roy n'a d'autre option que de fuir la Nouvelle-Orléans emmenant avec lui, Rocky, une toute jeune prostituée, elle aussi rescapée du carnage, la sœur de cette dernière, Tiffany, âgée de quatre ans, et une assurance-vie sous la forme de documents très compromettants pour Stan. Direction, Galveston, Texas, où le trio trouve refuge dans un motel miteux parmi d'autres cabossés de la vie. Nous sommes alors en 1987.

Bien que Roy ait à plusieurs reprises envie de partir, quelque chose le retient. La fragilité bouleversante de Rocky, le fardeau sordide qu'elle veut taire résonne chez lui comme un écho à ses propres blessures. Et puis, il ne peut abandonner Tiffany, ce petit bonheur d'appétit de vivre.

«IL Y A DES EXPÉRIENCES AUXQUELLES ON NE PEUT SURVIVRE ; après elles, on n'existe plus entièrement, même si on n'a pas réussi à mourir. Tout ce qui s'est passé en mai 1987 ne cessera jamais de s'être produit, sauf qu'on est maintenant vingt ans plus tard et que tout se qui s'est déroulé à ce moment-là n'est qu'une histoire».

Une histoire terrible, une expérience traumatisante dont Roy est sorti brisé au propre comme au figuré mais qui a fait de lui un homme meilleur, transformant l'alcoolique nombriliste en anti-héros magnifique. Vingt ans plus tard, le passé semble le rattraper sous les traits d'un mystérieux personnage en Jaguar. S'agit-il cette fois d'un arrêt de mort implacable ? Passé et présent alternent au fil des chapitres pour s'unir à la fin en une osmose salvatrice. La désespérance qui hante le roman laisse alors place à une lueur d'espoir.

En lisant Galveston, on pense souvent à James Ellroy, David Goodis ou encore Dashiell Hammett ; cependant pour ce premier roman, Nic Pizzolatto, lui aussi américain, trouve sa voix originale. Un cocktail de sauvagerie stylisée, de virilité parfois bestiale mais aussi d'émotion retenue et de tendresse pudique, qui offre des pages d'une beauté tout simplement incandescente.

Florence Bee
( Mis en ligne le 31/08/2011 )
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