Pages

jeudi 25 juin 2009

Le cinquième évangile


Michel Faber Le Cinquième évangile
L'Olivier 2009 / 18 € - 117.9 ffr. / 195 pages
ISBN : 978-2-87929-668-5
FORMAT : 14cm x 20,5cm
Traduction d'Adèle Carasso.

Mieux vaut ne pas jouer avec le feu !


Paru à l’origine chez l’éditeur écossais Canongate, Le Cinquième évangile fait partie de la série Myths qui propose la réécriture d’un mythe fameux par un auteur contemporain célèbre. Dans le cas présent, celui de Prométhée dont Michel Faber, acclamé entre autres pour La Rose pourpre et le Lys, s’empare avec un enthousiasme communicatif. Notre Prométhée est ici Theo Griepenkerl, un universitaire canadien pas franchement excitant mais singulièrement ambitieux et narcissique.

Envoyé en Irak par le Toronto Institute of Classical Studies, nous le rencontrons au musée de Mossoul où il essaie de convaincre le conservateur récalcitrant de lui confier des pièces de valeur. Lorsque… une bombe explose, le musée s’écroule, le conservateur périt mais pas Theo qui fait alors une découverte fabuleuse : «… il remarqua qu’un bas-relief représentant une déesse enceinte qu’il avait admiré lors de son premier passage, avait été endommagé par l’explosion. Le ventre – creux contre toute attente - était ouvert comme la coquille d’un œuf éclos. Il baissa les yeux sur le dallage du sous-sol, là où les débris de pierre avaient atterri. Et parmi ces débris, enveloppés d’une étoffe lâche, il y avait neuf rouleaux de papyrus».

Vieux de deux mille ans mais intacts, un véritable trésor ! Persuadé qu’ils lui sont destinés puisque rédigés en araméen - sa spécialité -, Theo s’empresse de les dérober. Peu lui importe l’humanité, c’est d’abord son bénéfice personnel et un avenir radieux qu’il envisage avec délectation. De retour chez lui, Theo s’attelle à la traduction des écrits de Malchus (serviteur du grand prêtre Caïphe puis disciple du Christ, ce personnage biblique est célèbre pour son oreille droite coupée par saint Pierre dans le jardin des Oliviers). Malchus témoigne des derniers jours de Jésus et de sa crucifixion – un véritable pensum pour le traducteur qui ne sait comment affronter tant de verbosité ! Cependant, ce que révèle Malchus sur la fragilité humaine du Christ donne aux documents le potentiel d’un best-seller. Potentiel que Theo cherche immédiatement à exploiter sans réfléchir au danger qu’il court à se mêler de religion et à ébranler de la sorte les fondations de l’édifice.

Qui dans Le Cinquième évangile va tourmenter Theo ? Pas d’aigle à l’horizon mais des vautours à l’envie, des fanatiques qui n’hésitent pas à passer à l’acte et une cohorte d’abrutis que Theo, rebaptisé Grippin, rencontre lors d’une tournée promotionnelle aux États-Unis. (son éditeur «l’avait convaincu que Theo Griepenkerl poserait problème aux clients et aux libraires ; les probabilités pour que quelqu’un l’orthographie mal lors d’une recherche informatique ou l’oublie tout simplement étaient trop élevées»).

Michel Faber se déchaîne contre le monde de l’édition et celui des médias, ridicules de vacuité et de suffisance. Le passage de Theo au Barbara Kuhn Show en dit long sur le peu de considération du romancier pour ces interviews préfabriquées et abrutissantes. Par ailleurs, il décoche quelques piques bien senties à l’auteur du Da Vinci Code dont il ne semble pas apprécier la contribution au genre ésotérico-religieux ! «Maudits soient ces exercices vénaux d’érudition imaginaire, ces foutaises fumeuses et cette théologie à la Mickey Mouse !»

Le mythe de Prométhée n’est pas à première vue synonyme d’hilarité et pourtant on rit souvent à la lecture de ce court roman. Trop court sans doute pour exploiter des idées intéressantes qui restent fréquemment embryonnaires. C’est un peu dommage !


Florence Cottin
( Mis en ligne sur parutions.com le 24/06/2009 )

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire