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dimanche 15 février 2009

The Peculiar Memories of Thomas Penman : Bruce Robinson


The Peculiar Memories of Thomas Penman
Bruce Robinson
Bloomsbury 1998
Paperback edition 2004

Tu seras un homme, mon petit-fils …

Né en 1946, en Angleterre, Bruce Robinson se lance à la fin des années soixante dans une carrière d’acteur assez peu probante selon ses propres dires. Vite lassé des trop longues périodes de chômage, il devient scénariste - The Killing Fields (1984), Whitnail and I (1986) entre autres lui valent succès public et respect de la profession, puis franchit une nouvelle étape en 1998, avec la sortie de ce premier roman particulier à souhait.
The Peculiar Memories of Thomas Penman raconte l’histoire d’un jeune garçon pas franchement bien sous tous rapports dans l’Angleterre ouvrière des années cinquante. Amateur d’alcool et de tabac, expert en explosifs, Thomas trouve un malin plaisir à épier les membres de sa famille et à fouiller dès qu’il le peut, la vieille bâtisse victorienne dans laquelle ils demeurent, à la recherche d’une clé qui lui ouvrira la porte du paradis – l’impressionnante collection d’images pornographiques de Walter, son grand-père.
Une tendre complicité unit les deux personnages, bouffée d’oxygène dans une atmosphère par ailleurs étouffante. Thomas semble cristalliser le malaise et le dysfonctionnement des siens, provoquant l’exaspération de sa mère et de sa grand-mère, le mépris de sa sœur et la haine de son père. Afin d’exprimer sa rébellion, il utilise ses excréments comme moyen de communication, se souillant à volonté et dissimulant ses étrons dans des endroits improbables.
Pourtant beaucoup d’intelligence et de sensibilité se cachent sous ce masque peu avenant.
Walter l’a bien compris et se sachant condamné par la maladie offre à Thomas une clé symbolique celle-là qui permettra à son petit-fils d’accéder à sa véritable identité.
Thomas devient le confident privilégié avec qui le vieil homme évoque pour la première fois Adèle, rencontrée pendant la Première Guerre mondiale – son premier et seul amour.
Une passion de même intensité naît bientôt entre Thomas et la ravissante Gwendolin – la tentation pornographique perdant alors son attrait.
L’adolescent se transforme en chevalier servant, éperdu d’admiration, maladroit et profondément émouvant dans des passages empreints d’une réelle poésie.
Bruce Robinson passe du lyrisme à la grossièreté la plus absolue sans aucune difficulté tout au long de ce drôle de roman d’éducation qui mêle le tragique au comique tarte à la crème et prend aussi souvent des airs d’autobiographie déguisée.
L’un des points communs les plus évidents entre l’auteur et son héros reste la fascination pour la vie et l’œuvre de Charles Dickens. À l’instar de Bruce Robinson, Thomas grandit dans une ville où l’écrivain a vécu. Source d’inspiration pour le premier, David Copperfield, roman autobiographique bien sûr, est aussi le livre préféré du second qui l’offre en version originale à l’élue de son cœur.
Bruce Robinson partage visiblement le goût de Dickens pour la caricature, proposant une réjouissante galerie de personnages secondaires, redoutablement bien saisis dans leurs travers respectifs. Jalousie, méchanceté, bêtise, conventionnalisme, rigidité, la liste n’est pas exhaustive !
Sans doute peut-on également comparer The Peculiar Memories of Thomas Penman à l’œuvre culte de J. D. Salinger, Thomas et Holden Caulfield éprouvant un écœurement similaire face au monde des adultes.
« Ce qui me met vraiment K. O., explique l’Attrape-Cœur, c’est un livre dont vous aimeriez, lorsque vous l’avez fini, que l’auteur soit un terrible copain à vous, de manière à pouvoir l’appeler au téléphone quand vous en avez envie. »
La citation convient parfaitement à ce roman jubilatoire.

(Mis en ligne en juillet 2005 sur sitartmag)

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